La ville de Saint-Louis est une création européenne, construite ex-nihilo, organisée à l’origine à partir d’un navire ancré au large de la côte. En 1633, la Compagnie du Cap-Vert établit un premier comptoir pour la traite des esclaves sur une île à l’embouchure du fleuve Sénégal. Dix ans plus tard, le comptoir est transféré par Louis Caullier dans une zone moins inondable, l’île de Ndar, qui prend alors le nom de Saint-Louis en l’hommage au roi de France.
L’implantation est protégée par une habitation fortifiée en brique de terre séchée, cantonnée de bastions, édifiée à partir de 1659. Durant le XVIIIe siècle, le fort est transformé et agrandi ; quelques dizaines de maisons en pierre importée, ou plus généralement en briques cuites, sont élevées à proximité sur des terrains concédés à l’usage des commerçants et des soldats. Ces maisons en dur sont entourées de huttes de paille ou de roseaux destinées aux domestiques ou à des entrepôts de marchandises.
En 1780, la ville compte 7 000 habitants dont 2400 mulâtres et 660 européens. Les Signares, femmes issues de métissage entre les européens de passage et les Saint-Louisiennes bâtissent des maisons à étages avec cours intérieure et appartements privés dont une partie est louée aux militaires, personnels administratifs et négociants européens.
Le commerce de la gomme s’intensifie et attire de nombreux ruraux. La ville compte en 1838 près de 12 000 habitants. Dès 1820 des sociétés de négoces, souvent originaires de Bordeaux puis Marseille, ouvrent des agences à Saint-Louis. Après l’abolition de l’esclavage en 1848 les sociétés comme Maurel et Prom vont élever le long des quais de vastes entrepôts où s’échangent les marchandises amenées par le fleuve et les produits manufacturés importés.
Reflet d’un développement intensif, de nombreux bâtiments civils, publics, religieux et militaires voient le jour dès la première moitié du XIXe siècle :
De 1854 à 1864, Faidherbe entreprend une série de travaux qui confirme l’essor de la ville. Il dégage les voies de circulation, trace le boulevard extérieur et commence l’aménagement des quais, lutte contre les inondations par des travaux de remblais et d’assainissement des berges, réglemente l’implantation des constructions notamment à la périphérie, encourage les constructions en dur, rase une partie des paillotes, édifie une nouvelle prison et un hospice civil pour les indigents et relie l’île à Guet Ndar et Sor par des ponts permanents.
L’âge d’or de la ville s’étend durant le dernier quart du XIXe siècle. A partir de 1879, elle est le siège du Conseil général de la colonie dont on achève le bâtiment en 1888. En 1895, Saint-Louis devient la capitale de l’Afrique Occidentale Française (A.O.F.) regroupant le Sénégal, le Soudan, la Guinée et la Côte d’Ivoire. Le chemin de fer reliant Dakar à Saint-Louis arrive à Sor en 1885 (la gare actuelle ne datant que de 1908) et le pont Faidherbe à charpente métallique remplace le pont de bateaux en 1897. L’île est alors dotée d’une adduction d’eau potable, de trottoirs et d’un éclairage public ; la totalité de la superficie habitable est lotie. A cette époque l’île compte 20 000 habitants.
L’île Saint-Louis présente un ensemble urbain, architectural, historique et culturel parmi le plus remarquables de l’Afrique de l’Ouest. C’est un des exemples bien conservé de villes coloniales, anciens comptoirs commerciaux développés à partir d’un fort comme à Gorée, Rufisque et Carabane au Sénégal et Grand-Bassam et Bingerville en Côte d’Ivoire. Ce site lagunaire et marécageux est choisi pour des raisons stratégiques en raison de sa proximité de la mer et de la facilité de défense.
Le tracé orthogonal de la trame viaire implantée à partir du fort est caractéristique du plan des villes nouvelles coloniales tracées par les officiers du génie. Le centre est quadrillé par des îlots carrés de 30m de côté qui se prolonge du nord au sud par des îlots de même largeur mais plus allongés de 75m de long. Les îlots transversaux encadrent les deux types précédents et bordent les deux bras du fleuve. Les structures géométriques des îlots sont inversement proportionnelles à leur éloignement du centre et à leur ancienneté. L’espace des îlots d’habitation aux parcelles surdensifiées est saturé, laissant peu de place aux espaces vert.
La sonnette d’alarme avait été actionnée dès les années 1970. En 1973, le conseil national de l’urbanisme déplore l’état de délabrement continu de la ville de Saint-Louis est incluse sur la liste des monuments et des sites historiques en août de la même année.
Le classement au patrimoine mondiale de l’UNESCO en 2000 couronne une série d’études et de missions, d’initiatives et d’actions d’information et de sensibilisation. Ce classement porte la ville de Saint-Louis et le Sénégal au devant de la scène internationale et implique un engagement fort des collectivités locales et des administrations nationales dans une politique de sauvegarde et de mise en valeur de l’île Saint-Louis.
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